dimanche 21 octobre 2007

"Control"-d'Anton Corbijn, suivi d'un chou-fleur.

"Control" ou Un modèle de biographie musicale filmée.


Retraçant la vie du chanteur Ian Curtis du groupe Joy Division pour son premier long-métrage,
Corbijn,-(photographe et réalisateur de clips pour U2 entre autres)-signe ici un objet filmique assez rare qui m'a séduit lentement au départ, pour littéralement m'hypnotiser par la suite.

"Under Corbijn Spell" je fus. Je connaissais ce groupe de nom seulement, mais je peux sans crainte affirmer que le film s'adresse tant aux fans qu'aux non-initiés à leur musique, tellement la qualité de la réalisation,- jumelée à la puissance évocatrice du jeu de Sam Riley -transcendent le sujet.

Jamais on ne sent la présence d'une caméra. Ça coule de source, les plans sont magnifiquement travaillés et cadrés dans un souci d'épuration qui étrangement, rend le tout sophistiqué.
L'expression "Less is more" prend tout son sens ici, car le personnage de Ian Curtis était au départ flamboyant de déprime troublée et il était facile de tomber dans le piège "pathétique à outrance" que Corbijn évite brillamment. Le choix du noir et blanc y est pour quelque chose en appuyant son propos. Il l'éclaircit et le magnifie sans redondance.

Sam Riley offre ici une performance mémorable dans la peau du chanteur.
Il n'interprète pas, il incarne viscéralement un personnage somme toute assez lâche qui ne savait pas composer avec la vie et ses vicissitudes.
Le mec épileptique était un abîme de mal-être, irresponsable et "sans colonne vertébrale".
Il nous étouffe de désespoir en dépit de son grand talent à la musique et l'écriture.

Les scènes musicales du film sont toutes autant de joyaux sobres du rock marquant la naissance du mouvement punk à l'époque. Leur musique, merveilleuse de mélancolie. J'étais déchiré entre me fermer les yeux pour apprécier l'écoute encore plus, et garder les yeux ouverts pour contempler ces scènes anthologiques. Ça m'a transporté, p'tain. Absolument planant.
Avec un super système de son couplé d'une acoustique soignée de la salle rendant justice à une trame sonore somptueuse de beauté.

Ma seule réserve: j'aurais souhaité plus de ces scènes musicales justement, et j'aurais retranché
quelques moments de déprime du personnage dans la deuxième partie du film.

Mais quand on vous offre un tel pur-sang, on ne regarde pas trop la bride.

8.5

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"I'm a cyborg, but that's (not) OK" -Park Chan-Wook (Corée du Sud)


"I'm a cyborg and I pue des pieds" ferait un meilleur titre.

Mon pressentiment s'est avéré juste. Foireux. Très foireux.
Encore dans les volutes de "Control" , je change de salle illico. Le film est commencé depuis une dizaine de minutes. En avoir manqué un peu plus m'aurait évité une perte de temps moins longue devant ce fatras indigeste, confus et mal monté. Méchante dégringolade.
Où suis-je merde, qu'est-ce que je fous là?! Comme si on me réveillait d'un beau rêve avec de la musique disco à plein volume.

Le réalisateur de "Old Boy", Sympathy for Mr. (et Lady) Vengeance,(que je n'ai pas vus mais dont on a dit du bien) se casse les dents sur ce premier essai-comédie insipide dont l'humour niaiseux à la "Abbott et Costello sur le retour" tombe à plat 97% du temps.

Bavard, laborieux et souvent hystérique; exaspère lentement, mais sûrement.
Espérant un resaississement qui n'est jamais venu, ça m'a pris tout mon petit change pour rester jusqu'à la fin, que certains spectateurs ont désertée. En bref, c'est l'histoire d'une dingo anorexique dans une maison de dingos qui se prend pour un robot et justifiant sa maladie en se disant: si je bouffe, ça bousille mon mécanisme. Un twit essaiera de la convaincre d'ingérer de la nourriture. Ç'aurait pu être drôle, ça ne l'est pas.

De ce naufrage, à peine quelques sourires et belles séquences qui se perdent dans ce magma.
Exemple parfait du cinéaste ne contrôlant pas un genre qu'est la comédie romantique.
Ça lui échappe presque totalement, tant les ruptures de tons maladroites s'accumulent pour faire un collier de perles en plastique cheap. Sorry Mr. Park, mais une actrice au joli minois, ça suffit pas. Chan-Wook a parié, il a perdu.

Peut-être pas le pire des navets, mais un choux en forme de fleur qui rôde dangereusement autour dudit rutabaga.

À éviter, et assez frustrant quand je pense aux autres bons films que je rate.
Ça m'apprendra à faire un choix impulsif basé sur la réputation d'un cinéaste sans prendre le temps de bien renifler l'affaire.

2.0

3 commentaires:

Anonyme a dit...

Merci pour cette critique de Control. Le combo, bon film vs bio musicale est assez rare, ça le rend encore plus attrayant!

Un jour... Probablement en DVD... Faut pas rêver hein? Sur grand écran à Québec ça serait étonnant...

Julie Delporte a dit...

A propos de Control. Moi aussi le temps passé sur ses relations amoureuses, au lieu de se concentrer sur Joy Division, m'a agacé. Cependant, j'ai entendu dire que le film était en fait inspiré d'un livre qu'à écrit par la femme de Ian Curtis.
C'est certes un beau film, le noir et blanc est très très beau, mais ça ne déborde cependant pas d'originalité. La pluie qui tombe à torrents, Ian qui sonne à la porte de la belle brune belge et le bisou sous l'eau... Dans le genre cliché c'est pas mal !
Un bon moment tout de même et je suis d'accord sur la prestation de l'acteur.

Yvan a dit...

Je vous souhaite d'être étonnés Épicure.

Bienvenu Julie.
Le triangle amoureux prend beaucoup de place effectivement; mais il s'est marié, a eu un enfant et un autre amour,leader d'un groupe prometteur en plus d'être mort à l'âge précoce de 23 ans.J'ai aussi entendu dire que les scènes sur le "band" étaient inspirées non pas par son ex, mais bien par les témoignages des autres membres du groupe.Il ne faudrait pas démoniser son ex-femme, étant une source d'information tout de même de premier ordre. Faut se méfier de ceux et celles qui encensent, ou démolissent ce film. Maintenant, moi je l'ai encensé, un peu car j'ai trouvé que ce film faisait date dans les biopics musicales.
Je maintiens mon appréciation.

Corbijn serait mieux placé pour répondre à ces questions mais perso, j'aurais retranché qques scènes du triangle pour la musique effectivement.

Cela ne m'a pas irrité outre mesure car ce triangle amoureux(bien décrit) a précipité sa chute tel qu'il apparait dans le film et il m'est apparu important de souligner ce fait, comme le fait bien Corbijn; mais sur 121 minutes, 10 minutes(gros max) de trop(l'histoire du couple) c'est pas la fin du monde.

À savoir si cela est la vérité, on le saura sans doute jamais, Curtis ne pouvant témoigner.