lundi 15 octobre 2007

FNC 3 - Nous les vivants (Roy Andersson-Suède)

Ce film m'a hanté toute la journée, j'ai fait des erreurs au boulot et je riais seul par moments.
Comme un dingo qui s'est fait taraudé la cervelle par un lavage poétique et qui en redemande.
Fabuleuse découverte le Roy. Et c'en est un, dans son genre. Unique, original, fin metteur en scène, poète tendrement désespéré, surréaliste conteur à l'imagination débridée.
Un humour les amis, un humour... Ya du Fellini, du Bunuel et du Kaurismaki mais mais, non. C'est du Andersson.
Roy Andersson. Un sens de la mise en scène rare.

La découverte de son univers est un véritable coup de coeur même si le film au moment du visionnement me laissait parfois tomber par ses baisses d'intensité soudaine et quelques scènes inabouties. Qu'importe. Hier soir j'ai vu un poème-cinéma d'une heure et demi sur grand écran. Avec ses hauts et ses ti-bas. Le mec a assez de génie pour littéralement nous injecter des rêves irrésistibles de drôlerie, avec une certaine douleur de vivre qui plane parfois au-dessus ou qui attend au détour.

Le visionnement a étrangement mûri en moi et je me dis aujourd'hui: tout le film baignait dans une poésie visuelle et musicale telle, que finalement je boude rien de ce que j'ai vu.

Je prend tout; qualités et défauts. Pourquoi? Parce que certaines parties du film dépassent la somme totale. Un ami m'a dit que cet opus était un "Andersson mineur" mais que ça valait amplement le détour.
Suite à ce visionnement je répond: Ouais ben, quand je verrai un "Andersson Majeur", je prend un congé de maladie le lendemain, hihi, et j'te paie une tournée mec.

Une poésie légère et grave en même temps qui secoue l'âme de bonheur dans ses meilleurs moments et vous laisse seul dans les pires. Ah ça c'est jouissif, ah ça c'est triste.

Bon. Le film. Étrangement dans le programme, le titre est "Nous les vivants" mais sur écran c'est : "Toi qui est vivant"
C'est une suite de saynètes (inégales) reliées ensemble par un fil narratif parfois très ténu.
Le rêve y est très souvent évoqué.
Cé pas compliqué, je vais faire ça simple: je veux toute son oeuvre en DVD.
En importation s'il le faut(avec sous-titres évidemment), mais j'irai jusqu'au bout de cette affaire.

Le film au complet est en plan d'ensemble ou semi-ensemble, je me souviens pas d'avoir vu du rapproché , peut-être du semi, mais pas de gros plan ni rapproché il me semble.
Une distanciation est donc voulue, avec importante domination du vert pâle pastel dans la couleur pour ce film. Distanciation que j'interprète par l'observation tendrement ironique d'Andersson des êtres humains que nous sommes, petites bêtes pensantes qui nous démenons en ce monde souvent absurde et qui déteint sur nos relations et nos valeurs.

Quoiqu'il en soit, je retiens plusieures scènes mémorables:

La jeune femme éperdue d'amour pour le guitariste rockeur.

"C'est si beau quand tu joues Micke"
"J'ai fait un rêve, on se mariait lui et moi, c'était si beau"
"Je t'aime Micke". Superbe séquence de noces rêvées dans un édifice-train.

Le type pris dans un embouteillage qui baisse sa fenêtre de voiture et qui s'adresse à nous en disant:

"J'ai fait un drôle de rêve l'autre jour, j'étais dans une fête de famille, mais ce n'était pas ma famille, l'ambiance était sinistre alors je me suis senti obligé de faire un truc rigolo..."
S'ensuit une hallucination jouissive, pendant que le type avance tranquilement dans la congestion.

ou bien celle-là: Un type se tient debout sur un balcon, sans rien faire, puis sa femme au loin lui demande:

-"tu fais quoi là?"

-Rien, je suis sur le balcon.

-Je sais que tu es sur le balcon, mais qu'est-ce que tu y fais?"

-Rien j'te dis, je suis simplement sur le balcon.

-Si t'es sur le balcon à rien faire, tu dois sûrement penser.

-Oui je crois bien.

-Tu penses à quoi?

-J'ai oublié quand tu m'as posé la première question.

-Tu pensais pas à moi?

-Je crois pas non.

-Tu penses jamais à moi.

....................................................

Voyez l'topo? Allez-y sans attentes, malgré mon appréciation bien perso, ça vaudra mieux.
C'est inégal, mais le bon est sublime.
Goûtez du Andersson, vous m'en reparlerez.

7.0 pour le film, 10 pour la découverte.

5 commentaires:

Simon Dor a dit...

Si tu veux découvrir d'autres Andersson, il y a bien sûr probablement son film le plus connu, Chansons du deuxième étage (traduit en anglais Songs From the Second Floor, mais j'aime pas utiliser le titre anglais d'un film qui n'est pas anglophone). Selon ce que tu en décris, le genre d'humour dont on se sent mal de rire car le contexte semble macabre, les deux films se ressemblent probablement. Quelqu'un pourra probablement confirmer.

marmel a dit...

Ça me fait plaisir que tu aies aimé ce film autant que moi!
Ça fait un mois que je l'ai vu et je pense encore très souvent à certaines images...
J'avais beaucoup aimé Chansons du 2e étage aussi. Mais je trouve que Du levande (car il est vrai que je ne sais plus trop à quelle traduction me fier) est différent au niveau de l'humour. Chansons avait une atmosphère similaire, glauque et tout. L'image était ressemblante aussi: les couleurs fades surtout. Mais le rythme était plus lent, le ton plus triste... Peut-être un peu moins accessible que Du levande.
Reste que les deux sont excellents.
Je crois qu'il faudra être patients car Andersson pond un film aux 10 ans on dirait ;-)

Yvan a dit...

Simon,merci jai fait qques recherches aussi, il a fait quantité de pubs dont certaines vues sur youtube sans savoir qui c'était vraiment. Il y a aussi "En Kärlekshistoria" (Une histoire d'amour suédoise) qui semble intéressant.

Marmel,nous partageons donc le plaisir Du Levande. J'ai trouvé très brillant son habileté à mélanger tragique et comique dans une même scène.

J'ai lu que son 2e long "Gilliap" fut un échec semble-t'il et que suite à cela, il a pris une pause de 25ans(!!) pour ne faire que quelques courts et beaucoup de pubs.

Finalement, je me sens un peu gêné de le découvrir seulement aujourd'hui.Pour cette raison,j'ai porté un bonnet d'âne toute la journée ;)

marmel a dit...

pas de quoi porter un bonnet d'âne ;-)
cette découverte se célèbre!

Yvan a dit...

Quelle bonne idée,je suis partant.
On devrait s'faire un ptit resto post-festival avec tous les
tinami(e)s que ça intéresseraient et échanger sur nos visionnements, entre autres.
Je lance l'idée comme ça...
Mine de rien...
Sans crier gare...
Le fond de l'air est frais...
Un tien vaut mieux que deux tu l'auras...
A beau mentir qui vient de loin...
C'est votre tour.