...Et de verte poésie.
De retour de la quinzaine des réalisateurs à Cannes
avec son dernier-né "Carcasses", le cinéaste Denis Côté
nous convie à un film singulier, atypique et original.
Un documentaire mélangeant habilement portrait et
fiction. Filmé sans scénario, j'avais l'impression
d'assister à l'expérience de laboratoire d'un
alchimiste excentrique qui marie des ingrédients
naturels et synthétiques, résultant en un produit
hybride surprenant qui une fois ingéré
vous rend léger,souriant,empathique et tolérant.
Son effet méditatif dure longtemps après la
projection.
C'est l'histoire de Jean-Paul Colmor, 74 ans,
personnage réel et haut en couleurs qui
ramasse, recycle et vend des pièces d'autos
antiques dans le fond d'un rang à St-Amable.
"Auto Colmor bonjour!"
"ENTREZ! ".
"S'cusez-moi d'vous crier din zoreilles,
ya kékun dehors qu'ia pas entendu".
Un sujet en or ce Jean-Paul, j'ai trippé dessus "big time".
Le véritable documentaire "straight" reste à faire sur
ce personnage à l'humour involontaire hallucinant.
Ponctué de moments surréalistes mémorables, le film
commence à la manière docu mais je soupçonne ce
bougre de cinéaste rusé d'avoir parsemé la première
partie d'éléments fictifs légers que lui seul connait.
Puis arrivent quatre trisomiques errants-dont un
armé- qui vont squatter le domaine, la fiction
prenant le pas sur la forme documentaire.
C'est ici que certains spectateurs pourront
décrocher un peu,beaucoup ou pas du tout.
J'ai trouvé cette excentricité bien amenée,
même si elle eût peut-être gagné à être un peu
resserrée et/ou écourtée au montage;
c'est une question discutable
qui variera selon les goûts.
Ça manque pas d'audace et perso j'aime ça,
ceux qui osent s'aventurer.
L'oeil Côté n'est cependant pas complaisant
dans la manière de filmer ses personnages,
prenant le temps de les "asseoir",
sans s'attarder outre mesure je pense,
mais là encore, les avis peuvent diverger.
C'est tout sauf consensuel, et favorise l'échange
entre cinéphiles. On peut voir une provoc
facile avec l'arrivée des trisomiques mais
ça va beaucoup plus loin que ça par la suite
à mon humble avis.
Dès le début, la caméra(tout en plans fixes)
nous imprègne lentement mais sûrement
de ces lieux hors du commun:
une immense cour à scrap envahie par
les arbres, où réside un solitaire enjoué,
vaillant et vif malgré son âge.
Le vieux monsieur a une énergie
personnelle jamais vue auparavant sur film,
ce qui établit l'unicité de cette oeuvre à la fois
personnelle et factuelle.
Sa maison est une véritable tanière
du ramasseux magnifique;
même les plafonds sont meublés.
Diable d'homme attachant ce Colmor,
qui vit dans un oasis de fer et de verdure.
Hors du temps, et pourtant en même temps
que nous. Il est toujours d'un naturel désarmant
pendant que nous spectateurs le regardons
sans voyeurisme. Il apparait toujours capté
à vif pendant que nous sommes présents.
Une trame sonore qui restitue
à merveille tous les sons ambiants,
magnifiquement enrobée
de symphonies de Mahler,ponctuellement.
Travail remarquable sur le son,vraiment.
On entend le soin et la minutie qui y ont été
apportés. Très beau montage aussi;
il revêtait certainement une importance
particulière étant donné l'absence de
scénario détaillé.
Beaucoup aimé cet essai poético-réaliste et
la profonde humanité qui se dégage
de ce film et son traitement, sur le sujet
de la marginalité et ses habitants
potentiels.
Convaincre et amener du monde en dehors
des normes établies de plus en plus sclérosées,
à monter dans une telle galère filmique
requiert beaucoup de savoir-faire
psychologique, de "doigté humain"
et de délicatesse.
Tous ces attributs transpirent de la
pellicule, numérique ou pas.
Il existe de ces natures humaines
qui se prêtent plus au jeu que d'autres,
Colmor est sans doute de cette trempe.
Mon seul bémol: trop courts ces 76 minutes!
C'était l'avis de ma comparse et d'un autre spectateur
avec qui j'ai brièvement échangé. On en voulait plus!
Encore du Colmor épicé de Côté!
Ouais cé en plein ça j'trouve...
Un documentaire aux épices,
goûteux à souhait mais qui plaira pas
nécessairement à tous les convives.
Les trisomiques sont improbables, mais
complémentaires au propos original sur la
marginalité et ses ramifications potentielles.
Au menu: Carcasses froides et coeurs vivants.
(Aparté):
En se contentant toujours du
steak-frites fadasse en haut de la liste,
(les blockbusters en général sauf exceptions),
le spectateur moyen s'atrophie le mou
avec une pâtée qui monopolise la plupart
des buffets cinoche sauf le Parallèle,
autres salles trop rares à Montréal.
Sans rien vouloir enlever à Xavier Dolan et son film
"J'ai tué ma mère",
(je verrai son film,pas vu le Villeneuve encore)
je trouve dommage qu'on ait tant parler de lui
et sa tronche au détriment de son film à Cannes
d'une part, et ceux de Côté,
(le plus méconnu,entêté et libre dans sa quête)
et Denis Villeneuve avec "Polytechnique" d'autre part.
('talk about: étroitesse d'esprit de nos médias "majeurs" locaux)
Je souhaite à Carcasses une vie plus longue
que 2 semaines au Parallèle, que je tiens
tout de même à remercier pour la diffusion
d'un objet filmique rare et rafraîchissant
comme un chant d'insecte ou d'oiseau
en campagne québécoise:
Tous les jours, à 20:45
au 3536 Boul. St-Laurent. Montréal.
6 commentaires:
Oh boy!
http://aretetoncinemaetfichenouslapaix.blogspot.com
Oh boy what,anonymous rat?
Ton lien est fermé et
hors d'usage.
Let's talk about
"Johnny Noballs".
You probably need to talk.
Go ahead, i'm listening.
I'm all ears.Feel free.
Les anonymes sont souvent
(pas toujours) comme les
pigeons.
Ils fientent.
Ils viennent larguer une
crotte plus ou moins
acidulée, ici et là,
puis s'envolent sans soucis
vers d'autres blogs à polluer.
Ils répliquent rarement ou jamais,
c'est le dernier de leurs soucis
d'être confrontés, pourquoi?
Parce qu'ils n'existent
pas,ou si peu.
Leurs mots ou paroles
sont autant de vents qui proviennent d'un orifice
par lequel les gens
intelligents excrètent.
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