jeudi 2 octobre 2008

Cliché de conversation- "L'oignon"

Eh oui. Après une longue absence, les revoilà frappant à la porte
de ma mémoire et celui-ci se fait insistant.
Sans plus tarder je vous en fait livraison.
Tranchouille de vie telle que vécue par votre humble serviteur.



"L'oignon"


J'arrive chez un client à un quai de déchargement et m'annonce.
Un quidam dans la cinquantaine s'amène prestement.
Je décharge les boîtes qui défilent de mains à mains,
puis une que j'échappe sur le pied du mec,
(il chausse des espadrilles)une lourdingue d'environ 20 kilos.
Il pousse un cri de douleur qui me semble un peu exagéré:

-AUGHH! MON NOGNON TABARNAAK ! !
C'est chien çaaahhh ,carré su mon nognon ostiiiii!
Un vendredi en plus aaawwwh!
(Il clopine comme un estropié, puis s'asseoit en vociférant).


-Désolé M'sieur l'ai pas fait exprès!

-Aaughh...T'aurais pas pu l'échapper ailleurs?!

-Ben quand j'échappe une boîte j'me dis pas:"Tiens je vais l'échapper juste là"!

-Commence pas à faire le smatte en plus esti m'as faire une plainte à compagnie!

-Ben là, j'vous ai dit que j'étais désolé, c'était pas intentionnel.

-Okok...Ah fuck drette dessus St-Crème...Aaaah...

Il enlève sa chaussure.

-"St-Crème", ça doit bien faire cinq ans que j'ai pas entendu ce sacre hihi! Dis-je.

Il massait frénétiquement la protubérance osseuse de son gros orteil gauche qui saillait sous sa chaussette, le visage grimaçant de douleur. Bref ça faisait mal quoi.

-Ma journée de golf de d'main est scrapée esti, j'pourrai
pas m'endurer d'la fin d'semaine!

-Vous pourrez pas jouer au golf?

-Mets-en que j'pourrai pas, aughh, ça s'peut pas.

Il enlève sa chaussette qui laisse voir une masse osseuse rougeâtre
au gros orteil.Il la frotte de la paume de sa main pour se soulager,
mais cela semble insuffisant. Puis arrive quelqu'un par derrière...

-Bon bon bon encore Roger et son nognon, tsé Roger vas falloir
qu'tu fasses quek' chose avec ça un m'ent donné...

-Une fricassée pt'être!? siffla Roger.

- hahah, ouen genre. Fais-toé opérer ou porte des bottes de sécurité!
répondit l'autre.

-Te l'ai dit qu'les bottes ça frotte dessus, pas capable de porter ça criss
cé trop serré pis l'opération oublie ça tu restes des s'maines sul carreau!

-Bon ben endure dabord mais tu s'rais pas un peu moumoune
sué bords ma grand-mère en a un nognon pis a braille pas comme toé!

-Veux-tu m'as t'en péter un nognon sua yeule!?
J'viens d'me prendre une boîte de 50 livres
dessus cibouère pis tu peux ben parler toé,
tu traumatises de t'voir un bouton dans l'cou!
(Il continuait le massage de sa mini-bosse, assis sur le béton)

-Moé ça, traumatiser pour un bouton mais vas chier !

- J'aimerais pas avoir un oignon. Fis-je.

-Cé pas drôle, cé souffrant que l'crisse, mmmpphh...

(Il me fallait partir, j'allais me mettre en retard.)

-Bon eh ben faut que j'y aille moi, désolé encore...Bon week end.
J'espère que vous pourrez aller au golf tout d'même.

-Non j'vas m'tremper l'pied à place, yéé ça va être le fun.
C'était pas d'ta faute...

-Bonne fin de journée.

-Mouin. Dit-il en remettant sa chaussette.


(...)


En quittant j'eus cette pensée:
Il suffit parfois juste d'un instant pour vous pourrir la vie pendant
des jours voire des mois et même des années lors de grande malchance.




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