mardi 7 août 2007

False Romantic Promises





















Il était une fois, la folie documentariste d'un homme qui, partant d'une statistique hallucinante dès le départ, se mit en tête de filmer un pont 365 jours par année, en 2004.
Burp m'a mis sur la piste de cet essai marquant, soit: les sombres secrets du pont Golden Gate à San Francisco, California.
Ce documentaire s'appelle : The Bridge , d'Eric Steel, documentariste américain qui réalise ici son premier film sur le suicide des "Jumpers", qui se crissent en bas de ce chef-d'oeuvre d'ingénierie incontesté, pour fuir un monde insupportable et en rejoindre hypothétiquement un autre dans la fuite. On croirait presque à l'appel d'une syrène de la mort, tant il y en a.
(24 en 2004)
On prétend dès le début que nulle part ailleurs au monde, il y a autant de suicides par structure interposée. N'y a-t'il pas ailleurs dans le monde une autre structure attirant autant de suicidaires pour un même bassin de population? Mystère, que ce film épaissit.
Perso, je proscrirais le visionnement de ce film pour quiconque a vécu le suicide d'un proche. Difficile à voir, c'est le moins que je puisse dire. À visionner un jour de moral en fer forgé.
La hauteur approximative de la chute, fatale dans la très grande majorité des cas: 70 mètres (225 pieds). Un peu comme entrer en collision dans un mur de béton à 120 km/hre en voiture.
La barrière ne fait qu'un mètre et un quart(4 pieds). Un jeu d'enfant.
Pendant 50 ans les autorités ont rejeté l'idée d'une barrière supplémentaire. Un projet serait à l'étude en ce moment, coût approx. : $25 millions US.
Cette année-là il y eut cependant une exception que Steel nous fait partager par un témoignage d'un ex-suicidaire. Prenant. Et je parle pas du sauvetage in extremis d'une autre.
Les cinéastes se sont consolés en constatant le sauvetage de quelques-uns par leur intervention , mais seront hantés à vie par l'impuissance lente, sur quelques autres.
À l'envers de la carte postale, Steel a filmé la mort en direct avec force visuelle, intelligemment.
Cru mais sensible,- la caméra filme de près sans être putassière, en plan d'ensemble et semi-rapproché sans nous épargner le désarroi pré-suicide -,(superbe montage) sans faux-fuyants tout en maintenant une certaine distance dans l'acte des suicidaires, mais il a menti sans doute à plusieur(e)s témoins qui pour la plupart, livrent des récits bouleversants de sincérité et vérité sur le suicide, la maladie mentale, l'amour, l'impuissance devant l'inéluctable, l'amitié et la perte d'un être cher.
Ce sera là ma principale réserve, à savoir: Steel a-t'il révélé son mensonge à ses témoins avant(sûrement pas!), pendant, juste avant ou après la sortie de son film?
C'est-à-dire: "J'ai filmé et vu votre ami-fils se tuer". (...)
Si les témoins qui se sont sincèrement livrés l'ont appris en visionnant le film, ils ont dû se sentir trahis comme jamais et cela est quant à moi impardonnable. Je crois Steel plus intelligent que cela.
Quoi qu'il en soit, le résultat est bouleversant. Ce film-là restait à faire, il le fut en 2004 par Eric Steel et il apporte autant de questions que de réponses. Ça hante. Hantons sous la pluie.
Des qualités cinoches indéniables, tant du point de vue formel qu'informel. Ralentis et accélérés maîtrisés, lumière variable, gros plans, plans d'ensemble et panoramiques, travellings.
La force des témoignages...Elle dépasse même celle des séquences suicidaires filmées, quoique...
La somme de travail et d'heures de visionnement pour arriver à un tel montage, impressionne.
Sans compter le travail de recherche pour retrouver tous les témoins des évènements.
On eût apprécié un "making of " plus élaboré que 20 maigres minutes, mais c'est toujours ça.
Coup de poing. Dur et nécessaire. Surtout dans ce cas de carte postale inversée.
Une gifle à la gueule de l'American Dream et en ce sens je suis pas surpris de le voir ici seulement trois ans après. Controverse.
Et sujet tabou.
Taboo.
P.S. Je serais curieux de savoir combien de personnes se sont déclarés leur amour ou leur engagement envers l'être aimé sur ce même pont, mais ça serait probablement le sujet d'un autre film .












2 commentaires:

Anonyme a dit...

Excellent commentaire. J'avais vaguement entendu parler de ce documentaire. Il est facile à se procurer? Il faut aussi que je vois Into Great Silence qui est paru cette année. C'est le genre documentaire qui a le plus à gagner avec le numérique. Impossible d'imaginer un projet de la sorte il y a 10 ou 20 ans. Mais justement cette forme d'intrusion implique maintenant beaucoup plus moralement

Yvan a dit...

À Québec, tu le trouveras au Vidéo Centre Ville, 218 Marie de l'incarnation. En VOA seulement.

Moi je l'ai bêtement trouvé au Superclub Vidéotron.Incroyable mais vrai.(une seule copie)après l'avoir vainement cherché au club vidéo répertoire à deux pas et qui m'a fait salivé par la belle place qu'il fait au cinéma d'auteur.

Into Great Silence, noté :)
On se reparle de ce Bridge quand tu l'auras vu mais un dernier mot:
un film remuant qui m'a fait penser d'ajouter ceci à ma "To do list" : célébrer la vie malgré les moments de désespoir que nous pouvons tous connaître un jour ou l'autre.